Les ballades du désir et ses obstacles

Aux origines du désir

Qu’est-ce donc que le désir ?

On en a. On n’en a plus. On en a moins… on l’évite. On en a trop. Et que désire t-on vraiment ?

Évidemment que lors de la rencontre amoureuse des impressions particulières sont apparues. Bien sûr que depuis tout petit, il y a des choses et des situations que l’on va chercher ou préférer parce qu’elles sont agréables. Certainement ce « truc » qui bouge en nous, cette forme de tension, demande a être calmée.

Des psys parlent de pulsion, d’autres de libido. Des thérapeutes parlent d’énergie, d’autres de Chi. Vulgairement on dit qu’il y a des besoins… ce qui justifierait (pas expliquer, mais justifier, ce qui est différent) nombre de demandes et de démarches pas toujours très romantiques ni partagées.

Pour moi, le DESIR est de l’ordre de la pulsion de vie. Je crois que nous sommes tous désirants parce que tous vivant et que cette « poussée », cette force, cette énergie, quels que soient le nom ou l’étiquette qu’on lui mette, s’exprime dans les trois fonctions de la sexualité (reproduction, plaisir, intégration sociale). Elle s’écoule au travers de tout ce qui est, comme un torrent furieux ou un fleuve tranquille, et cela depuis les premiers instants de notre univers.

Au niveau de l’individu, cette ENVIE va être soutenue ou freinée, augmentée ou amenuisée, colorée ou grisée par le corps et ses capacités sensorielles, par l’histoire de la personne, sa construction psychoémotionnelle et son enracinement transgénérationnel, par l’environnement socioculturel dans lequel il se développe. Et puis il y a éventuellement cette rencontre avec un(e) autre, avec d’autres.

Et le désir sexuel ?


Si l’on considère l’expression du désir (pulsion de vie) au travers des trois fonctions de la sexualité, la question du plaisir et tout particulièrement du plaisir partagé dans l’orgasme ou dans des sensations plaisantes revêt une couleur toute particulière. Dans le sens où il va s’agir d’une ballade. Si elle peut être courte, brutale, longue, pénible, laborieuse, donc non totalement plaisante, elle devrait d’abord être vécue ou du moins attendue comme agréable voire jouissive.


Et il n’y a pas de différence naturelle, intrinsèque dans la présence de la pulsion chez l’homme ou chez la femme. Si un écart existe, cela vient de la construction de la personne et de son environnement ou bien de sa place au monde (comme lors d’une maternité).


Cette jouissance durant la ballade me fait toujours penser au précepte de Chamfort qui dit :« jouis et fais jouir sans te faire de mal et sans faire de mal à autrui… ».


La promenade commence au mieux par de la communication puis de la tendresse amoureuse ou non. Elle demande ensuite une sensualité et de l’érotisme pour enfin ouvrir le lieu du partage sexuel. Libre à chacun et à chaque couple ou groupe libertin de trouver les ingrédients et voies nécessaires au périple.


L’absence ou l’évitement de désir sexuel renvoie chacun sur un chemin autre que celui du couple équilibré et harmonieux. Quelquefois, il est à l’origine de troubles de la sexualité comme le vaginisme, la dysérection, l’éjaculation précoce voire l’anorgasmie. D’autres fois, il détruit le couple dont le trépied de base ne peut supporter de perdre un de ses trois supports essentiels (amour-attention, sécurité matérielle et sexualité). Les obstacles alors sont à traiter rapidement.


Les obstacles au désir


La santé sexuelle est vitale, elle est essentielle pour tous, quels que soient la forme de circulation et le chemin que prend le désir, à partir du moment où ils sont choisis donc non contraints. Dans ce sens, tout ce qui va bloquer le désir et son partage va devenir source de souffrance.


Les obstacles peuvent avoir plusieurs origines :


  • Trajectoire personnelle (construction psychoémotionnelle, éducation familiale, scolarité, maternité/paternité, image de soi, traumatisme, abus sexuel) ;

  • Histoire familiale et transgénérationnelle ;

  • Contextes socioculturel et religieux ;

  • Environnement socio-professionnel ;

  • Santé et situation de handicap ;

  • Troubles sexuels (spirale vicieuse où le non désir créé le trouble qui engendre du non désir etc) ;

  • Relation à l’autre et qualité relationnelle du couple.


Ce qui est difficilement pris en charge relève souvent du transgénérationnel car il peut être compliqué de trouver l’origine du problème et laborieux de le traiter. Cela ne veut pas dire que les autres situations se règlent facilement.


Pour exemple, ce couple dont l’homme se refuse souvent à sa femme parce qu’il « n’a pas beaucoup de besoin » dit-il. Ils (R et F) sont jeunes trentenaires, n’ont pas encore d’enfant, se connaissent depuis plusieurs années et viennent d’emménager ensemble. R a eu une enfance compliquée avec le divorce de ses parents quand il avait 5 ans. Sa mère est partie avec un autre homme le laissant seul avec son père. F a eu une enfance à priori tranquille et harmonieuse où elle a pu découvrir la masturbation jeune adolescente et une sexualité partagée à 16 ans quand elle l’a choisie avec un garçon qu’elle aimait. Ses parents sont toujours ensemble. Elle est donc plutôt très désirante et prend du plaisir avec orgasme quand ils ont des échanges intimes. Sa vision du couple est sereine.


Il s’avère qu’en remontant dans l’arbre transgénérationnel de R, on voit que son père, enfant unique, a été orphelin de mère à 5 ans et placé chez une tante (sœur du grand-père). La grand-mère paternelle, dépressive, abandonnée, peut-être violentée s’est suicidée à 35 ans face aux adultères et absences répétés du grand-père… « c’était un queutard toujours en vadrouille qu’avait la main leste !» dit la grande tante adoptive. Après deux générations, R pourtant passionnément amoureux de F a une représentation triste du couple et vit la sexualité comme un danger. Non consciemment, le couple est pour lui un objet insécure et la vie intime, même si elle apporte du plaisir, risque d’abîmer le couple. D’ailleurs, il est persuadé que F va le tromper un jour. Aussi, l’attention n’est pas mise dessus. Son désir se transfère ailleurs… dans le travail.

Extrait de l’arbre transgénérationnel de R&F